Le secteur du luxe avance à contre-courant d’un climat économique chahuté, et Kering en offre une illustration nette au troisième trimestre 2025. L’entreprise a dévoilé des résultats au troisième trimestre 2025 en léger repli, mais meilleurs qu’attendu, confirmant une capacité d’ajustement rapide et des fondamentaux solides.
Dans un moment où les devises, l’inflation et des arbitrages de consommation redessinent les priorités des clients, le groupe maintient le cap grâce à une exécution plus sélective et à des marques qui savent parler à la fois au désir et à la raison.
Un contexte moins porteur mais maîtrisé
L’enjeu majeur du trimestre reste l’alignement entre désirabilité et valeur perçue. L’inflation rogne l’appétit sur certaines catégories, les voyageurs internationaux reviennent de façon inégale, et la sensibilité prix se lit plus franchement sur certaines clientèles. Malgré cela, Kering amortit le choc.
La lecture est claire : un portefeuille de maisons différenciées, une politique de distribution plus pointue, un pilotage des stocks plus fin. Autrement dit, moins de dépendance aux volumes promotionnels et plus d’attention à l’équilibre entre ventes à court terme et prestige à long terme.
Résultats financiers au T3 2025 : un recul contenu
Le groupe enregistre une légère baisse de 2 % du chiffre d’affaires par rapport à l’an passé. Le mouvement reste contenu, soutenu par la division mode et maroquinerie qui signe des performances solides.
Les ventes en Chine montrent des signaux de stabilisation, signe que l’investissement patient sur l’expérience retail et la personnalisation commence à porter. La dynamique est plus contrastée en Europe et en Amérique du Nord, mais la rationalisation des assortiments et la montée en gamme des collections limitent l’érosion.
Points à retenir
Chiffre d’affaires en recul modéré de 2 pour cent.
Division mode et maroquinerie résiliente.
Chine en voie de stabilisation, avec un trafic mieux qualifié.
Les marques phares au centre du jeu
Le tempo du trimestre se lit à travers Gucci et Saint Laurent, locomotives du groupe, chacune avec un récit distinct, mais reliées par une même exigence d’élévation de marque.
Gucci : une mutation qui s’accélère
Chez Gucci, la feuille de route se concentre sur la cohérence stylistique et l’élévation du mix. Les collections récentes, pensées pour séduire une clientèle plus jeune tout en nourrissant le cœur historique, clarifient l’ADN maison. Les capsules resserrées, un merchandising plus net et une politique d’e commerce plus éditorialisée renforcent la lisibilité. La marque évolue dans un espace concurrentiel intense, mais la trajectoire reste orientée vers la qualité des ventes plutôt que la course au volume. Le résultat est tangible : davantage de paniers premium et une meilleure rotation des icônes, sans diluer la rareté.
Saint Laurent : la croissance par la clarté
Saint Laurent continue d’additionner les trimestres solides, portée par une identité très lisible et une exécution sans fioritures. Le prêt-à-porter s’affirme par des silhouettes ancrées dans la réalité d’usage, la maroquinerie joue la carte de la signature intemporelle, la chaussure consolide la récurrence.
La recette est simple et difficile à imiter : collections désirables, distribution maîtrisée, communication précise.
Résultat, une croissance qui se nourrit autant de clients fidèles que de nouvelles recrues, sensibles à l’alliance de tradition et de modernité.
Des stratégies d’adaptation concrètes
Face à un marché moins linéaire, Kering déploie une palette de réponses très opérationnelles.
Diversification des canaux : montée en puissance de l’e commerce propre, rationalisation des partenaires, plus de synergie entre digital et boutique. L’objectif est de mieux contrôler la présentation de l’offre, la donnée client et la qualité de l’expérience.
Investissements durables : matières responsables, traçabilité et éco-conception. Au-delà de l’image, cela sécurise l’approvisionnement et répond à la demande d’alignement entre style et impact.
Renforcement en Asie : en Chine, l’accent est mis sur la relationnel client, des expériences retail immersives et des lancements rythmiques qui parlent à des communautés très connectées.
Discipline commerciale : pilotage fin des ventes, constitution d’assortiments plus courts, limitation des remises, mise en avant des lignes cœur qui ancrent le positionnement prix.
Perspectives : prudence active et potentiel de reprise
Les trimestres à venir s’annoncent exigeants, mais les éléments de reprise existent. Une normalisation progressive des flux touristiques, la poursuite de la stabilisation en Chine, et une saisonnalité plus porteuse pour la mode et maroquinerie peuvent créer un levier. L’important sera de continuer à nourrir la désirabilité par des collections lisibles, de tenir la ligne de prix, et de capitaliser sur les clients fidèles à haute valeur.
Kering dispose des atouts clés : maisons iconiques, maîtrise de la distribution, exécution industrielle solide, gouvernance attentive au long terme.
Un impact qui dépasse le seul groupe
Quand Kering tient ses positions, c’est l’ensemble du marché du luxe qui prend la mesure du cycle. Les arbitrages du groupe en matière de ventes, d’e commerce, de merchandising ou d’expérience client servent souvent d’indicateurs avancés pour le secteur. Les concurrents observent, s’ajustent, redéfinissent leurs mix produit.
Dans ce contexte, la performance du T3 2025 n’envoie pas un signal d’euphorie, mais d’agilité assumée, ce qui, en période heurtée, vaut plus qu’un sprint opportuniste.
L’élégance du contrôle
Le troisième trimestre 2025 confirme une évidence. La force d’un groupe de luxe ne se mesure pas seulement à la croissance brute, mais à sa capacité à protéger la désirabilité, à soigner ses marges et à investir avec constance. Kering illustre cette discipline. Un repli de 2 pour cent maîtrisé, une mode et maroquinerie solide, des ventes en Chine qui se stabilisent, des maisons qui parlent juste. Le chemin n’est pas exempt de défis, mais l’orientation est nette. La résilience n’est pas un slogan, c’est un style de management.
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